• Les contemplations (17/31)

    L'amour paternel dans toute sa splendeur ! De joyeux souvenirs bercés par tant de mélancolie mais aussi de bonheur... 

     

     

     

    VI

     

    Quand nous habitions tous ensemble

    Sur nos collines d'autrefois,

    Où l'eau court, où le buisson tremble,

    Dans la maison qui touche aux bois,

     

    Elle avait dix ans, et moi trente ;

    J'étais pour elle l'univers.

    Oh ! comme l'herbe est odorante

    Sous les arbres profonds et verts !

     

    Elle faisait mon sort prospère,

    Mon travail léger, mon ciel bleu.

    Lorsqu'elle me disait : Mon père,

    Tout mon coeur s'écriait : Mon Dieu !

     

    A travers mes songes sans nombre,

    J'écoutais son parler joyeux,

    Et mon front s'éclairait dans l'ombre

    A la lumière de ses yeux.

     

    Elle avait l'air d'une princesse

    Quand je la tenais par la main. 

    Elle cherchait des fleurs sans cesse

    Et des pauvres dans le chemin.

     

    Elle donnait comme on dérobe,

    En se cachant aux yeux de tous.

    Oh ! la belle petite robe

    Qu'elle avait, vous rappelez-vous ?

     

    Le soir, auprès de ma bougie,

    Elle jasait à petit bruit,

    Tandis qu'à la vitre rougie

    Heurtaient les papillons de nuit.

     

    Les anges se miraient en elle.

    Que son bonjour était charmant !

    Le ciel mettait dans sa prunelle

    Ce regard qui jamais ne ment.

     

    Oh! je l'avais, si jeune encore,

    Vue apparaître en mon destin !

    C'était l'enfant de mon aurore,

    Et mon étoile du matin !

     

    Quand la lune claire et sereine

    Brillait aux cieux, dans ces beaux mois,

    Comme nous allions dans la plaine !

    Comme nous courions dans les bois !

     

    Puis, vers la lumière isolée

    Etoilant le logis obscur,

    Nous revenions par la vallée

    En tournant le coin du vieux mur ;

     

    Nous revenions, coeurs pleins de flamme,

    En parlant des splendeurs du ciel.

    Je composais cette jeune âme

    Comme l'abeille fait son miel.

     

    Doux ange aux candides pensées,

    Elle était gaie en arrivant... -

    Toutes ces choses sont passées

    Comme l'ombre et comme le vent !

                                       Villequier 4 septembre 1844.

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