• Les contemplations (4/31)

    Hugo aimait les femmes, tout le monde le sait. Ces deux poèmes montrent l'admiration qu'il avait pour la gente féminine et en tant que femme, j'avoue qu'il est bon et doux de le lire...

     

     

    VIII

     

     

    Tu peux, comme il te plaît, me faire jeune ou vieux. 
    Comme le soleil fait serein ou pluvieux 
    L'azur dont il est l'âme et que sa clarté dore, 
    Tu peux m'emplir de brume ou m'inonder d'aurore. 
    Du haut de ta splendeur, si pure qu'en ses plis
    Tu sembles une femme enfermée en un lys, 
    Et qu'à d'autres moments, l'oeil qu'éblouit ton âme 
    Croit voir, en te voyant, un lys dans une femme,
    Si tu m'as souri, Dieu ! tout mon être bondit ; 
    Si, madame, au milieu de tous, vous m'avez dit, 
    A haute voix :  Bonjour, monsieur,  et bas : Je t'aime !
    Si tu m'as caressé de ton regard suprême, 
    Je vis ! je suis léger, je suis fier, je suis grand ; 
    Ta prunelle m'éclaire en me transfigurant ; 
    J'ai le reflet charmant des yeux dont tu m'accueilles ; 
    Comme on sent dans un bois des ailes sous les feuilles, 
    On sent de la gaîté sous chacun de mes mots ; 
    Je cours, je vais, je ris ; plus d'ennuis, plus de maux ; 
    Et je chante, et voilà sur mon front la jeunesse ! 
    Mais que ton coeur injuste un jour me méconnaisse ; 
    Qu'il me faille porter en moi, jusqu'à demain
    L'énigme de ta main retirée à ma main ; 
    — Qu'ai-je fait ? qu'avait-elle ? Elle avait quelque chose. 
    Pourquoi, dans la rumeur du salon où l'on cause, 
    Personne n'entendant, me disait-elle vous ? — 
    Si je ne sais quel froid dans ton regard si doux 
    A passé comme passe au ciel une nuée, 
    Je sens mon âme en moi toute diminuée ; 
    Je m'en vais, courbé, las, sombre comme un aïeul ; 
    Il semble que sur moi, secouant son linceul, 
    Se soit soudain penché le noir vieillard Décembre ; 
    Comme un loup dans son trou, je rentre dans ma chambre ; 
    Le chagrin — âge et deuil, hélas ! ont le même air, — 
    Assombrit chaque trait de mon visage amer, 
    Et m'y creuse une ride avec sa main pesante. 
    Joyeux, j'ai vingt-cinq ans ; triste, j'en ai soixante.
                                       Paris, juin 18...

     

    XI

    Les femmes sont sur la terre 
    Pour tout idéaliser ; 
    L'univers est un mystère 
    Que commente leur baiser.

    C'est l'amour qui pour ceinture
    A l'onde et le firmament, 
    Et dont toute la nature, 
    N'est, au fond, que l'ornement.

    Tout ce qui brille, offre à l'âme 
    Son parfum ou sa couleur ; 
    Si Dieu n'avait fait la femme, 
    Il n'aurait pas fait la fleur.

    A quoi bon vos étincelles, 
    Bleus saphirs, sans les yeux doux ? 
    Les diamants, sans les belles, 
    Ne sont plus que des cailloux ;

    Et, dans les charmilles vertes, 
    Les roses dorment debout, 
    Et sont des bouches ouvertes 
    Pour ne rien dire du tout.

    Tout objet qui charme ou rêve 
    Tient des femmes sa clarté ; 
    La perle blanche, sans Ève, 
    Sans toi, ma fière beauté,

    Ressemblant, tout enlaidie, 
    A mon amour qui te fuit, 
    N'est plus que la maladie 
    D'une bête dans la nuit.

     

                                       Paris, avril 18...

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