• Un jour, un poème (5/19)

    Je vous propose aujourd'hui deux poèmes de Ronsard. Si le premier vous fera évidemment pensé à son fameux : "Mignonne allons voir si la rose qui ce matin avait déclose....", le second par contre est une merveilleuse déclaration d'amour... Que ce début d'été vous rende romantique à souhait ! 

     

     

    Comme on voit sur la branche

     

    Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose,
    En sa belle jeunesse, en sa première fleur,
    Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur,
    Quand l’Aube de ses pleurs au point du jour l’arrose;

    La grâce dans sa feuille, et l’amour se repose,
    Embaumant les jardins et les arbres d’odeur;
    Mais battue, ou de pluie, ou d’excessive ardeur,
    Languissante elle meurt, feuille à feuille déclose.

    Ainsi en ta première et jeune nouveauté,
    Quand la terre et le ciel honoraient ta beauté,
    La Parque t’a tuée, et cendres tu reposes.

    Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs,
    Ce vase plein de lait, ce panier plein de fleurs,
    Afin que vif et mort, ton corps ne soit que roses.

    Pierre de Ronsard La Continuation des Amours, 1555

     

     

    Madrigal

     

    Si c’est aimer, Madame, et de jour et de nuit
    Rêver, songer, penser le moyen de vous plaire,
    Oublier toute chose, et ne vouloir rien faire
    Qu’adorer et servir la beauté qui me nuit :

    Si c’est aimer de suivre un bonheur qui me fuit,
    De me perdre moi-même, et d’être solitaire,
    Souffrir beaucoup de mal, beaucoup craindre, et me taire
    Pleurer, crier merci, et m’en voir éconduit :

    Si c’est aimer de vivre en vous plus qu’en moi-même,
    Cacher d’un front joyeux une langueur extrême,
    Sentir au fond de l’âme un combat inégal,
    Chaud, froid, comme la fièvre amoureuse me traite :

    Honteux, parlant à vous, de confesser mon mal !
    Si cela c’est aimer, furieux, je vous aime :
    Je vous aime, et sais bien que mon mal est fatal :
    Le cœur le dit assez, mais la langue est muette.

     

    Pierre de Ronsard Sonnets pour Hélène, 1578

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